« Je pense que Paris deviendra le principal hub financier de l’UE après le Brexit »
Le Royaume-Uni a quitté l’Union Européenne le 31 janvier à 23 h locales. Bon nombre d’électeurs de la City qui avaient voté ‘Remain’ le regrettent amèrement. Pour autant, rien ne changera à court terme, puisque la période de transition est prévue pour durer jusqu’à la fin de l’année. Ce qui laisse largement assez de temps à Paris pour prendre une position centrale dans la finance au sein de l’UE.
« Je pense que Paris deviendra le principal hub financier au détriment d’autres villes d’Europe après le Brexit », confie un MD de JPMorgan à Londres, en partance pour la capitale française. « Je suppose qu’elle accueillera la majorité des personnels de front office relocalisés en raison du Brexit – la plupart des forces de vente du continent et environ 20% des traders des principales banques. »
De nombreuses banques ont également fait de Francfort leur point de chute pour la période post-Brexit. Goldman Sachs, Morgan Stranley, Standard Chartered et UBS ont toutes choisi la ville de Goethe et de la BCE pour y installer la base de leurs activités de trading au sein de l’union, et certaines banques américaines comme Jefferies y ont également renforcé leurs activités de banque d’investissement. Toutefois, le tout dernier rapport du thinktank New Financial indique que 69 établissements ont opté pour Paris, contre 45 pour Francfort. Bank of America a déjà installé 450 personnes dans le huitième arrondissement, et JPMorgan a annoncé récemment son intention de racheter les anciens bureaux de BNP Paribas, 21 place du Marché Saint-Honoré, offrant le potentiel pour accueillir des effectifs équivalents.
L’expansion des banques américaines sur le marché français suscite déjà quelques vagues à l’échelle locale. Leo Lopes, du cabinet de chasse de têtes Vendôme Associés, évoque quelques « tensions » autour des rémunérations, alors que les banques américaines sont en plein recrutement à Paris et que les traders en provenance de Londres débarquent dans la capitale avec des prétentions de salaires délirantes.
Dans l’immédiat, Leo Lopes précise que les candidats n’arrivent pas dans son bureau en disant « je veux travailler pour une boîte américaine », mais que c’est bien la qualité de l’équipe à intégrer qui leur importe le plus. Cela dit, un banquier junior de BofA n’a pas caché que le bureau parisien du géant américain faisait l’objet de toutes les convoitises, pas seulement dans la capitale, mais aussi en Europe : « j’ai beaucoup de chance ; c’est un grand privilège de participer à l’aventure BofA à Paris, dans une banque en pleine expansion, avec l’ambition de gagner des parts de marché en Europe ». Le moral au bureau de Paris est au beau fixe, ajoute-t-il : « les gens sont ravis de travailler et de vivre en France. Le navire a quasiment atteint sa vitesse de croisière et nous sommes très optimistes quant aux perspectives de succès. »
Bien évidemment, vivre à Paris ne présente pas que des avantages. A commencer par les impôts, même si la mise en place par Emmanuel Macron du ‘régime des impatriés’ peut en moduler les effets pour tous ceux venant s’installer en France après plusieurs années à l’étranger. Il y a aussi les manifestations, et les récentes grèves dans les transports. Mais toujours selon notre MD de JPMorgan, ce ne sont que des problèmes mineurs : « les grèves font partie du processus de transition pour préparer la France à l’avenir, et ne constituent pas un facteur permanent à prendre en compte dans les décisions affectant le long terme. »
Et d’ajouter : « Paris est mieux dimensionnée que ses rivales pour le titre de centre financier européen. Il lui faudra des années pour offrir ce que Londres proposait jusqu’à présent, mais les autres villes européennes font face à des obstacles bien plus importants. Y compris Francfort, qui est tout simplement trop petite. »
Article by Sarah Butcher.
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