BAROMETRE METIERS #16 – PRINTEMPS 2021
Notre baromètre est de retour avec un tour d’horizon de quelques tendances emploi et recrutement observées récemment sur nos métiers…
L’EDITO
Bas les masques ! Nous en rêvons tous, alors que la crainte du “ce ne sera plus jamais comme avant” anime moult esprits… En contrepartie notre dictionnaire des acronymes ne cesse de s’enrichir. PGE et PPSE sont ainsi les nouvelles vitamines qui tonifient les acteurs de la Finance. Un sparadrap aux forts impacts sur les équipes d’analyse et de relation commerciale bancaires jusqu’alors en berne. Le repli sur soi qui prévaut depuis douze mois est source de thésaurisation, un magot fort convoité qui voit les banques privées être challengées par de nouveaux acteurs, des Family Office aux banques étrangères en quête de nouveaux marchés, tous porteurs d’une offre novatrice… Les Asset Managers ne sont pas en reste, adeptes déjà de la RSE, ils sont à corps perdu dans la mise en scène d’une offre “real asset” tout en savourant la fin d’un Brexit dont ils partagent enfin les effets positifs avec la Finance de marché.
Paris le nouveau Hub ? On en a douté après l’avoir espéré, l’optimisme gaulois s’accompagnant culturellement d’un regard pessimiste sur le futur. Or, aujourd’hui on le fête, car il est réalité. In fine, il fait bon vivre dans l’hexagone, tout au moins les opérateurs de marché pour beaucoup londoniens nous l’ont fait savoir, eux qui, même non-francophones franchissent de plus en plus le “Channel”. On aurait pu penser toutefois que les difficultés rencontrées ces derniers mois par certains desks (tels les dérivés actions) et la chute drastique de leur bonus qui en a résulté, comme l’apport massif de la technologie dans la gestion du quotidien, furent un frein… mais il n’en est rien. La Finance est responsable et dans la crise on se serre les coudes, d’autant plus que la quête permanente de solutions ravive le quotidien : effet confinement avalé, on réagit et on innove. Pour preuve, les Financements Structurés qui repartent de plus belle, tel le LBO qui brille à nouveau, séduit par ce tissu des PME PMI ETI que toute la Finance découvre avec envie, y inclus les entreprises étrangères qui font plus que frapper à la porte. Pour y répondre, il faut du monde. Tout comme les moyens de paiement, sujet attractif, dont tous les acteurs financiers se sont emparés…
Certes nous sommes encore confinés, mais la Finance est belle et bien déconfinée, et Paris libéré. Le marché est ouvert, attractif et responsable. Chacun peut s’y projeter, nous sommes là pour vous y aider.
Denis Marcadet
CORPORATE (Large & Mid Caps)
Des situations très hétérogènes à gérer en fonction des secteurs et structures de société caractérisent la période passée et celle à venir. Des sujets d’optimisation de coûts et de cash restent d’actualité mais aussi de belles opportunités de croissance externe car, si certains secteurs sont à la peine, d’autres tirent très bien leur épingle du jeu et en profitent pour se développer avec des conditions de crédits très favorables. Un point commun cependant, l’activité reste très dense pour les CFO et les DAF !
Avec la crise, la récurrence des prévisions budgétaires s’est accélérée, ce qui a incité les directions financières à digitaliser davantage le pilotage de la performance et les process clés (facturation par exemple). Il a fallu également optimiser l’organisation du travail tant à distance qu’en mode plus collaboratif.
Les profils recherchés se concentrent toujours sur des compétences solides, habitués aux négociations qui peuvent se tendre à certains moments. Des fiches de poste où les capacités à avoir une vision transversale cash/coûts/prévisions restent clés mais où savoir conduire les changements le sont tout autant. Ceci explique que contrairement à d’autres, le Corporate est positionné sur un marché qui reste actif avec des opportunités sur-variées auprès de grands groupes, ETI ou participations Midcaps de fonds PE.
ASSET MANAGEMENT / PRIVATE BANKING
- ASSET MANAGEMENT
Après une année complexe, on constate une baisse des bonus de 15 à 20%. Les sanctions ont été fortes pour les équipes de gestion qui sous-performent depuis deux ans ; certains desks ont des bonus à zéro. Idem pour certains commerciaux, surtout ceux travaillant pour des entreprises étrangères, qui ont connu des cuts très sévères, plus liés à des politiques groupe qu’à une appréciation de leur performance personnelle.
Suite au Brexit, les commerciaux basés à Londres relatent un vrai flottement depuis le début de l’année. Malgré l’enregistrement de fonds désormais effectués en Irlande, les possibilités de distribution de Londres restent non tranchées. Certains projets de création de desk à Paris sont à nouveau d’actualité, y inclus pour des Hedge Funds.
Les transferts effectifs des équipes londoniennes à Paris de JP Morgan, Barclays, Crédit Suisse… et les difficultés de pouvoir commuter entre Paris et Londres du fait de la pandémie, entrainent une arrivée effective sur ce premier semestre de conjoints en recherche de postes à Paris. Jusqu’alors, les candidats en recherche étaient plutôt natifs français ; désormais arrivent des profils étrangers, polyglottes, beaucoup issus du secteur de l’Asset Management. Parmi eux, certains collaborateurs francophones peuvent devenir des concurrents sérieux, dans la cadre de recherche pour les plateformes européennes de distribution à Paris.
Les investissements en moyens humains et en création de produits sont en majeur destinés aux activités en Real Assets, au détriment de l’investissement côté. Les sociétés de gestion de Real Assets en hyper croissance se structurent et recherchent des profils en Relations Investisseurs, Client Services, Data, Controlling…
- BANQUE PRIVEE
Un bilan positif en terme de collecte pour l’année 2020 mais les résultats restent néanmoins plats ou en baisse pour certains. De fait, on constate des gels de salaires fixes ou des augmentations au cas par cas. Les performeurs ont cependant été récompensés.
Le client UHNWI reste la cible privilégiée de la Gestion Privée : les équipes de Multi Family Office positionnées sur ce segment continuent de se renforcer, les banques privées étrangères (Goldman Sachs et Barclays) bougent leurs pions à Paris à l’image de Pictet & Cie qui affiche ainsi ses ambitions avec un profil ex-JP Morgan nommé à la tête de son bureau parisien.
Au sein de sociétés avec un ADN Gestion Privée sont ouverts des postes qui doivent anticiper les plans de succession de gérants et accueillir une nouvelle génération dont les enjeux seront de marketer et développer des marques parfois peu connues.
Pour conforter le maillage régional des banques privées “pure players”, les bureaux en province renforcent ou renouvellent leurs équipes pour conserver ou créer une proximité géographique avec le client. Lyon, Nantes, Strasbourg ou encore Toulouse sont les villes avec des actualités récentes de recrutement.
BFI – FINANCE DE MARCHES
Concernant les activités de Marchés, Paris s’impose de plus en plus comme le nouveau hub Européen. De nombreuses relocalisations vers Dublin ou Francfort se sont finalement faites en faveur de la capitale française, les collaborateurs y exprimant nettement leur préférence. Ce fut le cas pour de nombreux traders, par exemple chez JP Morgan, Goldman Sachs, Barclays ou Citi qui augmentent leurs équipes de manière un peu plus importante que ce qui était prévu en ce début d’année 2021. D’autres banques internationales britanniques, chinoises et canadiennes sont également en train de renforcer leurs équipes.
Esquisser des tendances précises en matière de recrutement est encore prématuré car les acteurs de la place sont en phase de “digestion” du Brexit et d’intégration de leurs nouvelles équipes en espérant que la greffe prenne bien. Les opportunités émergeantes seront donc davantage liées à des remplacements dus aux refus de relocalisation ou à des bonus décevants.
En termes d’activité, après des montagnes russes parfois paradoxales, le marché Actions a affiché de nouveaux records. Les aides de l’Etat et politiques des banques centrales (PGE, mesures de chômage partiel, hélicoptère money…) ayant permis d’éviter les faillites ont fait que, malgré la forte volatilité, les conditions de liquidité se sont au final améliorées.
En revanche, les pertes sur les books dérivés actions (notamment structurés et exotiques) n’ont pu être rattrapées. Les bonus en chute libre chez les françaises leaders sur ces marchés (SG, NATIXIS et BNPP dans une moindre mesure) en témoignent. Les banques américaines aux parts de marchés plus faibles sur cette activité ont mécaniquement moins soufferts, pour certains opérateurs ils sont même à la hausse.
Sur le marché obligataire la liquidité a été plus difficile à trouver, notamment chez les brokers. Il n’en demeure pas moins que dans certains établissements bancaires les P&L 2020 ont atteint des montants records, en particulier, desks secteurs publics et SSA. Les bonus suivent ou pas les évolutions des P&L mais restent contractés. L’année 2021 ne devrait pas non plus manquer de relief.
En perspective, une année technologique voire cryptologique avec en toile de fond des risques de cybersécurité accrus, l’une des conséquences du télétravail généralisé.
M&A / PRIVATE EQUITY
Un bilan d’une année 2020 marquée par la Covid en trois temps : un premier trimestre dynamique dans la continuité de l’année 2019, un second trimestre totalement à l’arrêt et un second semestre où l’activité est fortement repartie, concluant sur une année intense pour le M&A avec des secteurs plus favorisés comme la santé ou les technologies.
L’éternelle problématique des juniors : les protéger et les retenir. Les meilleurs éléments des classes juniors sont très protégés car il apparaît de plus en plus un problème de turn-over et de ressources pour l’exécution. Hormis quelques mouvements dans les boutiques nouvellement implantées ou créées à Paris, le métier du Conseil semble marquer le pas en terme d’attraction pour les classes juniors : un cycle complet d’Analyste est désormais très souvent jugé “suffisant” pour regarder avec attention des positions en buy-side. Certaines grandes banques anglo-saxonnes dont les banquiers ne sont toujours pas revenus au bureau ont du mal à intégrer des juniors qui sont depuis plus d’un an chez eux, seuls derrière leur ordinateur : difficile pour certains de rester motivés dans ce contexte.
Des banquiers seniors globalement plus impactés, les ED et MD sont malmenés malgré une année intense et dynamique, parfois même historique pour certains conseils. L’impact Covid, réel ou prétexté selon les dires des banquiers, a marqué la période des annonces, et de nombreux seniors ont été déçus sans pour autant générer des départs ou des envies d’ailleurs. Ils restent assez enclins à laisser une chance de plus à leur entreprise en anticipant une année 2021 sur la même dynamique et avec un retour à des bonus plus classiques. Les seniors vont devoir réinventer de nouveaux moyens d’originer des mandats sans l’intimité des discussions en présentiel.
CORPORATE BANKING
Suractivité saison 2 !
Après une année très dense, notamment suite aux mises en place des PGE, le rythme reste très soutenu dans les équipes de Financements Structurés et de Leverage. Certes, l’inquiétude sous-jacente des banquiers intervenants en terme de risques et de marges reste d’actualité, sachant que les équipes dédiées aux Affaires Spéciales et Restructuring se sont étoffées en parallèle. En attente d’un peu de visibilité sur les impacts opérationnels des PPSE, on note des renforcements d’équipes dont certaines ont vu leurs bonus sauvegardés.
Coté Paiements, là également une activité très dense, toujours positive et très innovante. Le contexte de pandémie continue d’accélérer les déploiements de solutions qui permettent à de nombreux acteurs de digitaliser leurs règlements et parcours clients. Les acteurs clés se sont réorganisés en interne pour renforcer leur Time to Market face à des concurrents très agiles. Cela se traduit par de belles opportunités à la fois en créations de postes ou renforcement d’équipes et sur des domaines variés (product management, CTO, responsable de lab techno, stratégie digitale, marketing produit, expérience client, e-commerce et… lutte contre la fraude !). Des profils avec des attentes importantes en termes de soft skills avec notamment la capacité à diffuser une dynamique de l’innovation en gérant les freins au changement, en portant leurs convictions, et en manageant des équipes souvent jeunes aux attentes élevées en termes de proximité.
CONSEIL
L’année 2020 a été considérée comme délicate par l’ensemble des acteurs, y compris ceux qui ont cependant tiré leur épingle du jeu. Les équipes ont quasi toutes été impactées à un moment ou un autre par le chômage partiel, ce qui, jumelé au télétravail intensif et la baisse (parfois très significative) des parts variables distribuées ou pas en ce début d’année, a pu créer des ambiances internes difficiles. Certains acteurs s’attendent d’ailleurs à un accroissement de leur turnover dans les mois à venir, ce qui risque de poser problème au moment où l’activité reprend avec des impératifs de staffing différents.
D’un point de vue plus stratégique, les Dirigeants et Partners anticipent une concentration de certains sujets traités sur un nombre réduit de prestataires et ils sont plutôt optimistes, à moyen terme, sur un enjeu de quitte ou double dans lequel une moindre présence peut se traduire par une sortie complète. Les grands donneurs d’ordre remettent à plat les roadmaps d’investissements car ils souhaitent prioriser et optimiser leurs coûts. Une réelle pression est exercée sur les TJM.
Pour l’ensemble des Directions clés (Finance, Marketing, Distribution…) l’accélération du digital au sens large (robotisation, dématérialisation, digitalisation des parcours client…) et les risques qui y sont associés (fraude, cyber sécurité, sécurisation des data…) restent des pistes importantes de propositions, accompagnés par des nouvelles modalités d’organisation du travail, avec des recrutements effectués en corrélation.